Le 31 mai 2024, la Maison du Management organisait son premier talk, un webinaire de 45 minutes pour croiser les regards et revisiter la notion d'autorité, comprendre comment celle-ci se manifeste dans le management et identifier ses vertus pour le collectif. Pour répondre à cette question "L'autorité est-elle vraiment un gros mot ?", la Maison du Management avait invité le sociologue Stéphane Moriou, auteur du best-seller "Feedback, le pouvoir des conversations" (Dunod, 2023) et Isabelle Legendre, Responsable de l’innovation managériale à la Banque Postale pour témoigner du programme 1000 managers mis en place dans le groupe autour de l'évolution de la culture managériale.
"Le monde souffre d'une crise de l'autorité : au sein de la société, vis-à-vis des gouvernements, des religions, dans l'éducation, dans les familles,..." explique Stéphane Moriou. Et pourtant le sociologue rappelle l'intention noble de l'autorité, qui éthymologiquement, vient du verbe latin "augeo" qui signifie renforcer, rendre plus fort, induisant l'idée de réciprocité de l'autorité et celle de faire grandir, de libérer le potentiel. Le sociologue distingue les 2 formes d'autorité qui cohabitent dans l'histoire de l'Humanité. La plus ancienne, l'autorité par soumission est souvent associé à ses dérives : l’autoritarisme, le totalitarisme, la tyrannie, surtout depuis la Deuxième Guerre Mondiale, tandis que l'autorité par engagement a émergé dans les organisations dans les années 90 avec la notion d'empowerment des équipes et l'applatissement des structures pyramidales.
Mais selon le sociologue, l'autorité retrouve ses lettres de noblesse quand elle conjugue ces deux types d'autorité, combinant l'exigence, l'assertivité avec la bienveillance et le feed-back constructif. "L'autorité c'est être exigent sur les résultats mais bienveillants avec les personnes, c'est distinguer ce qu'ils font de ce qu'ils sont", explique Stéphane Moriou.
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A la Banque Postale, la culture managériale est en pleine transition entre l'attitude "command & control" et une posture de manager coach et facilitateur : comme dans de nombreuses organisations, on y développe le participatif, l'intelligence collective, un style managérial avec lequel certains managers ne sont pas familiers. Pour les accompagner dans cette nouvelle culture managériale, la Banque Postale a développé depuis 7 ans, le programme 1000 managers, pour les managers et avec eux : "Ils déterminent ce dont ils ont besoin, travaillent de façon autonome en fonction de leurs pratiques, des difficultés qu'ils rencontrent, ils prototypent, expérimentement, partagent des retours d'expérience. Il y a des chantiers autour de l'autonomie des équipes, ou encore des capsules management, un temps de développement personnel entre pairs pour travailler de façon ludique sur la peur, l'estime de soi, la vérité, la bienveillance, mais aussi du co-développement ou encore du coaching interne", explique Isabelle Legendre. Elle ajoute : "On travaille sur l'assertivité autour d'un atelier dédié, on utilise aussi des outils comme la CNV [Communication non violente]." Un programme dont les mots clés confiance, cohérence (authentique et bienveillante) et collectif, créé de l’engagement, de la fierté et donc de l’efficacité chez les managers qui y participent et par ricochet chez les équipes qui en voient les fruits.
"Dans les périodes difficiles, recourir à l'autorité par soumission, c'est une solution de facilité, explique Stéphane Moriou, on le voit bien aujourd'hui à l'échelle de la société avec le retour des discours populistes." Et de nous rappeler que l'autorité se partage aussi, que les citoyens comme les collaborateurs sont des adultes, éduqués, capables de raisonner, et que c'est dans le partage, la co-construction des règles, dans les temps de qualité avec son équipe, ou encore dans le sens que l'on va donner aux décisions, que l'autorité va puiser toute sa substance. A bon entendeur !
par Gaëlle Roudaut
